Remise
en état
d'une commande lumière Impulse "Microlite" MC8
Oui... non... oui, d'accord... Ceci n'est pas de
la
radio ancienne ! Mais c'est tout de même "vintage"
puisque
cet engin date de 1986.
Il s'agit d'une commande de lumières,
séquenceur ou encore "chenillard" à 8 canaux, assez
sophistiqué.
Découvert en octobre 2015, cet appareil
était toujours utilisé en matériel mobile,
et installé dans un flight-case. En fort bon état, il
s'allume toujours mais les diodes
LED de la commande scintillent un peu, comme si une alimentation
était trop faible ou mal filtrée...
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Etat cosmétique fort bon pour du
matériel qui a fonctionné en "mobile" !
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La société Impulse
était basée sur les hauteurs de Liège et a
produit du matériel de commande
d'éclairages. D'après le numéro de
série, celui-ci date de 1986. Cette entreprise
ne semble plus exister en 2015, toute information bienvenue !
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Une belle réalisation "made in Belgium",
donc !
Au niveau des fonctionnalités, c'est
très
complet avec 32 programmes différents (choix manuel ou
automatique), 4 modes de défilement (avant, arrière,
inversion 2X, inversion 4X), plusieurs modes
d'effet (chenillard, fondu enchainé, super programme,
réaction au son,...) et plusieurs modes de commande de la
vitesse (par potentiomètre ou au son ou combinaison des deux).
Un bouton "go" permet d'envoyer la puissance sur les lampes
connectées aux sorties, et un potentiomètre permet de
diminuer l'intensité lumineuse sur l'ensemble des lampes.
Il s'agit donc bien d'un séquenceur,
destiné à faire clignoter des lampes ou projecteurs,
avec des effets lumineux complexes. Ce genre de matériel est
employé en discothèques, dancings, lors d'alimations
diverses,... A ne pas confondre avec des
pupitres d'éclairages
de scène, qui permettent de doser les
intensités
lumineuses sur chaque sorties, indépendamment... Ces pupitres
sont plutôt utilisés en théâtre, en
concerts,... Ce n'est pas la même
fonctionnalité.
Explorons maintenant cet engin sur le plan
technique, avec un peu de
"rétro-engineering", suivi de la remise en état.
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Une vue l'arrière de
l'appareil. Un
bornier permet de connecter l'arrivée
secteur et les 8 lampes. Il manque malheureusement le cache de
protection autour de ces connexions. Les sorties de câbles se
font par presse-étoupes plastique, certains étant
incomplets.
8 fusibles protègent les triacs de
sorties, et deux prises permettent la connexion d'un signal audio sur
l'appareil (certaines fonctionnalités étant
rythmées par la musique)
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Ouverture de la boîte...
Un circuit imprimé supporte
l'alimentation et les 8 sorties à triacs. Le câblage
vers les fusibles et le bornier est réalisé en
conducteurs souples.
Fixé derrière la face avant, un
second circuit imprimé contient l'électronique de
commande. Les deux circuits sont reliés par des conducteurs
souples, avec un connecteur 16 pôles.
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Une autre vue de l'intérieur. Le circuit
de commande comporte plusieurs circuits intégrés, une
EPROM et ce qui semble être un micro-processeur. On verra cela
à l'autopsie !
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Puisque l'alimentation se trouve sur le circuit
imprimé de puissance, et que de toutes façons c'est
à ce niveau que se trouvent la plupart des pannes dans ces
appareils de commande d'éclairage, examinons-le...
Les conducteurs de puissance étant
soudés, mais longs assez, il est possible de sortir
partiellement ce circuit hors du boîtier, après avoir
dévissé ses fixations.
On voit ici les 8 triacs BT139 et un autre
composant TO-220 (un peu caché par les fils et le condensateur
bleu). Tous ces composants datent de 1984-1985.
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Une autre vue sur les triacs et sur leurs circuits
de commande. Les triacs sont isolés entre eux et par rapport
au dissipateur par des micas et rondelles isolantes.
L'isolation galvanique entre la commande et la
puissance est prévue, par des
opto-coupleurs. Ceci est indispensable puisque les circuits de commande
des triacs sont reliés au secteur !
Normalement, on doit donc trouver deux
tensions d'alimentations dans l'appareil. Une pour la logique de
commande, isolée du secteur ; et une autre pour piloter les
triacs, reliée au secteur.
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L'exploration continue, côté
pistes du circuit.
Très propre, bien
réalisé. La piste commune aux triacs est de bonne
surface, c'est logique puisqu'elle doit supporter un courant fort
important. Si toutes les sorties sont actives en même temps,
cette piste est traversé par la somme de tous les courants de
chaque sortie
!
Les sorties étant prévues pour
un courant nominal de 6A, il y en a 8 ... on peut donc avoir jusque 48A
circulant dans cette piste commune !
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Dans les années 80, peur de rien
!
Ces condensateurs sont pris en direct sur le
secteur, l'orange de 100nF/ 400V entre phases et les deux petits de
2,2nF entre chaque phase et la terre !
Aux normes actuelles, les condensateurs pris entre
phases doivent être de type X2 et ceux entre phase et terre
des Y1 minimum (construits pour ne pas se mettre en court-circuit).
Donc, ces composants anciens sont à remplacer (bien que
semblent toujours ok, le différentiel de l'atelier ne
déclenche pas).
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Un peu de "rôti" par ici ... le
redresseur et le condensateur situé à
proximité ont eu chaud !
Relevé de schéma fait, il s'agit
justement de l'alimentation de la logique de commande...
Composants à remplacer aussi, ils
poseront problème un jour ou l'autre !
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Voici le relevé de schéma de la
platine de puissance.
Le transformateur possède bien deux
enroulements séparés et on retrouve bien deux
tensions séparées. Le 8V DC est relié au
secteur, pour la commande des triacs. La tension du second enroulement
est redressée (+ filtre par 4 petits condensateurs en // sur
les diodes) et sert pour la logique de commande. Une diode suit le
redresseur, avant le condensateur de filtrage. Entre le redresseur et
cette
diode, on trouve le 50Hz redressé, qui est envoyé tel
quel vers la platine de commande. Ceci va servir pour la commande des
triacs (détection du moment de passage par zéro du
secteur). Après la diode, filtrage et régulation
classique par un 7805 monté sur le dissipateur
commun (et isolé de celui-ci par mica et rondelle
isolante).
Les 8 sorties à triacs ont un
schéma identique. Le transistor NPN amplifie le
courant de l'opto-coupleur. Quand la LED
intégrée de
celui-ci s'allume, le transistor interne conduit et commande ainsi le
transistor NPN de commande du triac. Le triac conduit quand un courant
de commande circule entre la "gâchette" et l'anode A1
(connectée à la phase). Le courant est fixé
ici par la résistance de 56Ω.
Les commutations par triac, et
spécialement en mode "dimmer" provoquent pas mal de parasites.
Ici, chaque canal est muni d'un filtre constitué d'une bobine
torique en série avec le triac, et d'un ensemble
résistance
56Ω
/ condensateur 100nF qui est en parallèle sur les connexions
A1-A2 du triac.
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Le chantier, maintenant !
Après avoir fait ces premiers
relevés, permettant de se faire une idée globale du
fonctionnement de l'appareil, la rénovation peut commencer. La
partie "exploratoire" est toujours nécessaire avant de
commencer des réparations dans un équipement inconnu
et dont on ne dispose pas du schéma. Pendant cette
découverte, plusieurs observations ont été
faites (condensateurs douteux sur le secteur, composants
brûlés, absence de fusible,...) : commençons
par la... Bien sur, si l'appareil avait été en panne
totale, il aurait d'abord fallu le
dépanner puis ensuite solutionner les quelques points
remarqués. Ici il s'agit d'une restauration d'un
appareil encore fonctionnel, mais un peu dégradé par
le temps et l'usage.
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Le transformateur ne comportait, assez
curieusement, aucune protection. Ajout ici d'un fusible de 250mA (T)
côté secteur.
Percement des trous et montage du support. Une
piste est interrompue pour l'insertion de cette protection.
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Les condensateurs du
filtre secteur ne me disaient vraiment rien que vaille.
Les anciens composants à droite, les
nouveaux à gauche.
Prêts pour installation !
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Les nouveaux composants pour le fitre secteur et
le porte fusible sont installés.
Ajout d'un conducteur vert-jaune vers la platine,
pour la connexion de la terre sur celle-ci, et
éviter que cette connexion se fasse uniquement par les vis de
fixation.
Rien de bien grave jusqu'ici... Tout cela
n'empêchait pas l'engin de fonctionner mais autant le
sécuriser un peu...
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Ah oui, ils ont eu bien chaud, ces composants
!
Remplacement de l'électrolytique, du
redresseur (par un de 1.5A), de la diode (également par un
modèle tenant 1.5A) et des 4 condensateurs 47nF
céramique.
Cet appareil n'aurait
assurément plus fonctionné fort longtemps
avec des composants dans
cet état.
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Les composants vieillis sont
remplacés.
A ce niveau aussi, une petite modification. Il y
avait bien un petit condensateur céramique de 100nF entre la
sortie du régulateur 7805 et la masse (condensateur
remplacé aussi) mais entre son entrée et la
masse il n'y avait pas de tel condensateur. J'y ai placé un
220nF. Deux petits trous dans le
circuit, et le voila placé à côté
du 100nF (juste devant le régulateur). Ces condensateurs
aident à la stabilité de ces régulateurs, et
doivent y être montés à proximité.
Le 100nF existant était d'ailleurs bien installé
ainsi, et le nouveau a simplement pris sa place...
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Côté secteur, un nouveau
câble de bonne section et utilisation d'embouts de
câblage sertis.
Egalement un nouveau presse-étoupe pour
ce câble, de type anti arrachement...
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Tant qu'à faire, puisque le capot de
protection des bornes est manquant, autant en refaire un...
Simple grille en aluminium, pliée aux
bonnes dimensions, pour refermer l'accès au bornier.
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Ambiance Mil'Dju !
Test de l'engin sur ampoules, pas de souci. Les
diodes LED de la commande ne scintillent plus, et vu l'état de
l'électrolytique de filtrage du 5V de commande, cela n'avait
rien d'étonnant...
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Première étape de cette remise
en ordre terminée ! Maintenant, place à la
restauration de la platine de commande. Reste en effet quelques soucis
mineurs : certaines LED s'éclairent
moins fort que d'autres, et aussi quelques mauvais contacts dans les
potentiomètres. Mais d'abord quelques oscillogrammes
relevés sur la puissance...
Remarque très importante !
Pour
vérifer les tensions du secteur avec un oscilloscope, il est impératif
d'alimenter l'appareil en test avec un
transformateur d'isolement ! Ne pas entreprendre ce genre de mesure si
le montage et l'usage de tels transformateurs, ainsi que leur couplage
à la terre, ne sont pas parfaitement
compris : c'est extrèmement dangereux si pas
maîtrisé !
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La courbe du dessous est la tension secteur.
L'ondulation visible est due à la faible puissance
du transformateur d'isolement utilisé ici (100VA) :
il
n'apprécie qu'assez modérément la charge de
8 canaux à triacs.
La courbe du dessus est celle relevée sur
une des sorties, ici la lampe est allumée assez faiblement :
la conduction du triac se fait plus ou moins au moment ou la
sinusoïde du secteur est maximale. On trouve donc une
alternance tronquée qui est appliquée à la
lampe, qui s'allume faiblement.
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Ici, la lampe est allumée plus fortement,
la conduction du triac se faisant au début de la
sinusoïde... Pour allumer totalement la lampe, il faut piloter
le triac au moment du passage par zéro de la
sinusoïde. Ici la conduction se fait un peu après, et
il en "manque" toujours un morceau.
Ce procédé se nomme
"découpage de phase" et est possible en pilotant le triac au
moment opportun.
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Et justement, pour piloter le triac au bon moment,
il est important que l'électronique de commande "sache" quand
la tension du secteur passe par zéro ! Ici, le signal pris en
sortie du redresseur (voir schéma ici plus haut) est
envoyé à la logique de commande : il est bien sur
synchrone avec le secteur. C'est la courbe du dessus, fortement
écrêtée par le redressement et la charge.
Sur la courbe du dessous, les impulsions
négatives sont celles correspondant au passage par
zéro du secteur. Et les impulsions positives sont celles de
commande du triac. Ici on le commande fort "tard", et la lampe
connectée ne s'allumera quasiment pas.
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Le graphique ci-contre correspond à
l'image des sinusoïdes représentant la lampe
fortement allumée. Le triac
est commandé peu après le passage par zéro
du secteur.
Les triacs peuvent être pilotés
par des impulsions très courtes : une fois
"amorcés" , il restent conducteurs tant qu'un courant circule
dans la jonction A1-A2. Ce courant s'annule lors du passage
par zéro du secteur, le triac redevient non conducteur
à ce moment. Ceci est vrai avec des charges
résistives (ampoules classiques ou halogènes), le
courant étant en phase avec la tension. Avec
des charges inductives, c'est autre chose puisque le courant n'est pas
en phase avec la tension... (c'est pourquoi nombre de "dimmers"
fonctionnent fort mal avec des éclairages alimentés
par transformateurs)
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Après ces quelques
relevés, et ces quelques mots d'ennuyeuse "théorie",
passons à la rénovation de la platine de commande...
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La platine de commande, côté
composants.
On y
trouve bien un micro-processeur, et c'est un
bon vieux Z80 ! En plus de l'EPROM qui contient le software de gestion
de l'appareil, on trouve deux mémoires RAM 2114 (1k en tout)
et une série de circuits intégrés TTL, pour
le décodage d'adresses et les registres pilotables par le
microprocesseur. A droite, un circuit LM324 associé à
des
composants discrets amplifie et filtre le signal sonore. Quelques
transistors pour le pilotage des LED et des afficheurs 7
segments.
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Cet appareil comporte donc une mémoire
EPROM de type 2732.
La date indiquée dessus est 5/10/86, donc
29 ans au moment de la rénovation de cet appareil...
Cest pas mal, car beaucoup
de ces
mémoires perdent leur
contenu au bout d'une vingtaine d'années. Celle ci aura bien
tenu, mais par sécurité, faisons-en une copie !
Lecture du circuit avec un programmateur adapté, et fichier
binaire sauvé sur disque.
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Le meilleur moyen d'être certain de la
sauvegarde est encore de programmer une autre EPROM avec ce
fichier, et
d'essayer la copie dans l'appareil...
Cela marche ! La mémoire originale est devant l'appareil
et c'est sa copie qui est en place sur la carte, pour faire
fonctionner l'engin. Précisons que cette sauvegarde de la
mémoire n'a pas pour but de refaire un "clone" de cet
appareil,
dont la technologie est maintenant dépassée
: il ne
s'agit que de maintenir un ancien équipement en
service, le plus longtemps possible...
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La platine de commande côté LED
et boutons poussoirs.
Peu de travail sur
cette carte : remplacement de
quelques LED ayant perdu de leur intensité lumineuse,
remplacement du potentiomètre de niveau lumineux et nettoyage
de
celui de commande de vitesse. L'appareil a subi un jour une
entrée de liquide, pas mal de traces sur le circuit
imprimé, qui a eu besoin d'un nettoyage.
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Le voila refermé, prêt
à reprendre du service !
Bien sur il fait maintenant partie de la
collection, et ne retournera plus en "tournées". Il
est destiné à une semi-retraite, peinard, dans le futur musée
... Car il y aura une partie d'exposition qui concernera les
années
80...
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D'une façon générale,
très bonne impression pour cet appareil, presque trentenaire
au
moment de cette intervention ! C'est une très
belle réalisation, très pro. D'ailleurs, s'il
avait été mal construit, cet appareil n'aurait pas
vécu aussi longtemps. Le "son et lumière" est un
domaine ou les équipements sont mis à rude
épreuve, et donc seul le plus solide survit !
Encore une belle preuve du savoir faire belge en
matière d'électronique... Car les quelques
petites remarques écrites ci-dessus ne
remettent nullement en cause la qualité initiale de cet
appareil.
Je suis à la recherche de toute
information concernant ce constructeur liégeois ! Si
vous en
avez (photos, catalogues, infos sur la firme,...) merci de me contacter
!
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